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"Malheureusement nous ne disposons d'aucune information officielle sur le nombre et la condition des femmes qui sont rapatriées par l’immigration dominicaine dans le pays à ce jour", a déclaré, dans une interview, le lundi 4 juillet 2016, Marie Élise B. Gélin, directrice du ministère à la Condition féminine et aux Droits des Femmes (MCFDF). Mme Gélin a du coup souligné la faiblesse de la structure étatique qu’elle dirige, ce qui, selon elle, diminue toute capacité d’intervention auprès de ces femmes dans le besoin.

Les femmes ne sont pas épargnées dans le cadre des rapatriements massifs des ressortissants haïtiens par les autorités dominicaines. Quand elles sont arrêtées par la police dominicaine, elles n’ont pas souvent le temps de prendre leurs effets.

En plus, elles sont, dans la plupart des cas, rapatriées loin de leur ville natale.

« C’est une stratégie de la police dominicaine visant à empêcher ces personnes de revenir très vite sur leur territoire »,  explique Géralda Sainville, responsable de communication au Groupe d’Appui aux Rapatriés et aux Réfugiés (GARR). « Les policiers leur demandent d’où elles viennent et ainsi, les envoient dans des points de rapatriement loin de chez elles. Parfois ils leur prennent même leurs pièces d’identification», a-t-elle fait savoir. Ajoutant : « Ces femmes, abandonnées à leur sort, sont à la merci des organisations travaillant dans le domaine et à la bonne grâce des habitants des villes frontalières, leur nouvelle terre d’accueil ».

Le GARR pour suppléer à la faiblesse de l’Etat

Il est 11h. Au point officiel de rapatriement de Belladère, arrivent deux  autres compatriotes. Munis de presque rien, ce couple a été contraint de regagner le pays, comme la plupart de leurs prédécesseurs. Melissa et sa famille, viennent augmenter à dix le nombre des personnes hébergées provisoirement au bureau du GARR.  Des agents d’accompagnement font de leur mieux pour aider les nouveaux arrivés à trouver de quoi se nourrir et se vêtir. Sans rien en poche, les nouveaux venus y resteront jusqu’à ce que des bons samaritains leur donnent quelques gourdes pour payer le transport pour rentrer chez eux.

Originaire de Hinche, Melissa, mère d`un garçon de deux ans, est une jeune femme de vingt-trois ans. Elle laissait le pays en quête d’une vie meilleure comme tant d’autres avant elle. Malheureusement, elle s'est fait arrêter en terre voisine avec sa famille par des soldats dominicains. « Nous nous sommes rendus là-bas pour chercher un mieux-être. Ici, je ne travaille pas, mon conjoint non plus. Nous ne pouvons pas prendre soin de notre enfant convenablement, alors nous avons décidé de partir loin de chez nous», explique-t-elle.

Melissa n’est pas parvenue à son objectif. Sans passeport, elle a tenté de fouler le sol dominicain pour ensuite essayer de régulariser ses papiers. « J’ai utilisé toutes mes économies pour payer un passeur et une fois arrivée, je pourrais me trouver des documents me permettant de rester pour quelques temps », affirme-t-elle. Malgré tous ces périples, Melissa n’a pas caché son désir d’y retourner. « Je retournerai là-bas à coup sûr », confie-t-elle. Tandis que la situation des migrants haïtiens ne semble pas s’améliorer car l’État peine à régulariser leurs documents dont la date de péremption est fixé au 18 juillet prochain. Le Programme national de Régularisation des Étrangers, PNRE, mis sur pied par le gouvernement haïtien, tarde à  donner des résultats.

« Jusque-là, aucune assistance de la part du gouvernement haïtien, ou du moins, nous ne sommes pas au courant », a déclaré Ulrick Camille, un des responsables du bureau de GARR à Belladère. « Nous sommes leur seul espoir », a-t-il conclu. Alors la directrice du MCFDF a fait état d’une aide acheminée aux rapatriés mais n’a pas été en mesure de fournir plus de détails à ce sujet.

D’autres femmes rapatriées arriveront dans les jours à venir. Elles seront sans doute prises en charge par des organisations car l’État ne semble guère se soucier d’elles puisqu’il n’existe aucune structure gouvernementale sur les quatre points de rapatriement officiel pour les accueillir. Les différents problèmes de gouvernance, du non-respect des droits de la personne sont parmi les nombreux qui poussent nos femmes à aller chercher ailleurs ce qu’elles n’ont pas trouvé dans leur patrie, ce à quoi elles ont droit.


Jean Emmanuel Pierre et Jean-Baptiste Ludelson

Ce reportage a été réalisé dans le cadre de l’atelier de renforcement de capacité des jeunes professionnels des médias et bloggeurs sur « les droits humains, la gouvernance et la démocratie » organisé par Panos Caraïbes en partenariat avec l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Bureau régional pour les pays de la Caraïbe et de l' Amérique Latine (BRECAL)  du 4 au 8 juillet 2016.